Tintin au pays du copié-collé ! 

1- Photocopieuse et papier calque

Les parodies de Tintin ne sont pas toujours réalisées par des amateurs habiles ou de véritables créateurs de BD. Tout le monde n'a pas les capacités d'un Exem ou Yves Rodier. La question du savoir-faire n'est peut-être pas la seule, il y a aussi celle des moyens matériels et financiers . Alors les créateurs se contentent de l'instrumentation élémentaire : photocopie, ciseaux et colle, papier calque, etc....
Certes l'exploitation des vignettes d'Hergé concerne aussi les meilleurs créateur. Presque tout le monde travaille en jetant un oeil aux albums d'Hergé. Cela passe parfois inaperçu alors que pour d'autres le détournement saute immédiatement aux yeux.
Les grands classiques de la parodie - pour certains cela remonte a plus de 30 ans (voir L'ami du patro)- ont été fabriqués avec des moyens techniques limités. Les vignettes d'Hergé sont soigneusement sélectionnées puis réorganisées sur une nouvelle page. La tâche est difficile car les dessins originaux ne sont pas toujours adaptés au nouveau récit. Dans certains cas il s'agit d'un copié-collé pur et simple avec des modifications au crayon ou des maquillages avec du blanc plus ou moins importants. Pour d'autres, les vignettes sont décalquées puis retravaillées pour évacuer parfois toutes les valeur de gris. D'autres enfin combinent les deux manières.
Parmi ces récits on retrouve : "
Tintin au Salvador", "Les Harpes de GreenMore", "Pinpin au pays des sornettes", "L'énigme du 3ème message", "Le petit vingt-cinquième", "Tintin dans le golfe", "Tintin au Chili", "Ovni 666 pour Vanatu", "Dindin et le secret de Moulinsal", "Tintin a Tien An Men", "Manuel à l'usage des farceurs", "La route du Soleil", "L'or des Orduenditos",...

Dans cette liste on retrouve un grand nombre de parodies politiques dont la longueur dépasse plusieurs dizaines de pages. Ces auteurs privilégient parfois le contenu à la qualité plastique. Et puis réaliser un récif de plus de 20 pages est largement facilité avec le copié-collé. Mais il serait injuste d'expliquer le clonage de vignettes originales uniquement pour des questions d'incapacité ou de manque de moyens. Des auteurs cherchent délibérément à mettre en évidence leurs sources. Tout le charme du récit repose sur la qualité des détournements. De nombreux jeux sémantiques sont alors possibles et la parodie porte ainsi particulièrement bien son nom.
Les résultats sont assez inégaux. . Il y a de belles réussites comme "L'énigme du 3ème jour (version 1)" ou "Le petit vingt-cinquième". Les images sont bien exploitées et les impressions remarquables. La qualité du matériel joue un rôle déterminant.
Lorsque l'ensemble est reproduit sans soin à la photocopieuse les résultats sont catastrophiques comme dans "Tintin à Tien An Men".

Le cas de "L'énigme du 3ème jour" est à ce niveau exemplaire. Il existe deux versions conçues de manière différentes. La première, l'original, est un petit bijou d'exploitation de vignettes d'Hergé. Elles ont été reproduites en ne laissant que le graphisme noir et blanc "strict , autrement dit, les contours. La BD a été imprimée sur une excellente machine qui a restitué correctement les noirs (traits et aplats). En revanche dans le "remake" d'un "fan" on ne retrouve devant des vignettes parfois illisibles. Les images photocopiées sont tout simplement médiocres. L'auteur voulait pourtant apporter de la profondeur à la version originales mais il a totalement échoué dans cette démanche. C'est dommage car son nouveau récit est bourré d'idées intéressantes. Pour éviter ses résultats décevants à la duplication beaucoup d'auteurs privilégient le dessin au trait et laisse tomber les gammes de gris.

La proportion des images clonées est très variable. C'est du 100% (ou presque) dans des récits comme "Tintin dans le Golfe", "Le petit vingt-cinquième", "Ovni 666 pour Vanatu". Dans les "Harpes de GreenMore" elle est moins importante. L'ajout de nouvelles images permet de résoudre les inévitables problèmes sémantiques. Il n'est pas facile dans une séquence des images issues d'album différents. Les décors changent, les vêtements ne sont plus les mêmes, le dessin des personnages est parfois différent, etc... L'auteur utilise alors des pirouettes narratives pour déjouer les incohérences. C'est assez bien fait dans "L'énigme du 3ème jour" ou "Tintin au Salvador" mais le résultat est médiocre dans "Tintin dans le Golfe" ou "Ovni 666 pour vanatu". Dans "La mort du maître" le mixage est particulier puisque c'est la BD qui bascule à la moitié du récit dans un univers d'images nouvelles et cela de manière très originale grâce à un moment d'ivresse !


L'oreille casée
© Moulinsart

Tintin au Chili


La mort du maître : le basculement graphique...
Beaucoup de parodies sont composées dans des proportions assez égales d'images clonées, modifiées et nouvelles. Ces co-existantes ne sont pas toujours réussies. C'est le cas dans "L'affaire K (intitulée aussi "Tintin à Zurich") et surtout vrai dans le redoutable "Tintin chez les rastas" qui détient dans tous les sens des termes la palme de la médiocrité et de la stupidité.

2- Souris et scanner

L'apparition des moyens informatiques va tout changer. Ils n'iront pas sonné pour autant la mort des outils classiques (et le désastreux "Tiintin a Tien An Men" le prouve) mais de plus en plus d'auteurs travaillent au scanner et à l'imprimante laser. Le monde du numérique favorise l'apparition de nouveau talents.

Lorsqu'un infographiste tintinophile s'empare de Tintin les résultats sont alors spectaculaires. La petite merveille du copié-collé c'est "Le grand secret". Marco (l'auteur) a utilisé le copié-collé car sa parodie est basée sur le détournement des parodies ou des pastiches. L'intrigue nous plonge en plein dans le milieu de la parodie et des problèmes de "Moulinsart". Là les gris, grâce à une imprimante laser, sont correctement restitués. Mais Marco, n'a pas réalisé un copié-collé numérique "strict. Toutes les vignettes ont été retravaillées. Certaines n'existent pas chez Hergé. En prenant une tête par ci ou une tête par là, il donne l'illusion d'un véritable détournement.

Une seule vignette est presque originale ! Laquelle ?

Un autre exemple récent utilisant les ressources du scanner nous est donné avec "
Tintin dans Loft Story !" Parodie totalement en ligne réalisée à partir de "Tintin et les Picaros". Le copié-collé est très bien réalisé et l'illusion d'une histoire originale fonctionne très bien.

Coke en stock
© Moulinsart


Le Grand secret T1

3 - Mutations d'images

Le copié-collé rigoureux est absent chez certains auteurs qui préfèrent bidouiller es vignettes originales en profondeur. C'est le cas de P. Somon dans la "Le mystère de la Toison d'Or" ou "Le piège bordure". L'auteur a procédé comme Marco c'est à dire de manière partielle. Mais chez Somon il y a surtout on parlera surtout de "mutation" car l'illusionnisme avec les véritables vignettes à disparu.
Mais là encore, toutes les vignettes ne sont pas concernées. Dans ses récit la cohabitation des images nouvelles avec les images modifiées est parfaite. C'est peu fréquent et il faut le souligner !


La source....
© Moulinsart - Bijoux de la Castafiore

... et la mutation !

Dans la Lune